« La famille est la 1° école des vertus sociales nécessaires à toute société. » (Jean Paul II ) Ce chapitre nous permettra, d’une part, de revenir sur beaucoup des notions précédemment évoquées et, d’autre part, de réaffirmer avec force que la famille (digne de ce nom)
est le lieu normal d’apprentissage de toutes les Valeurs.Remarques liminaires:
– La réalité familiale a des aspects contradictoires.
D’un côté, la famille occupe la 1° place dans les sondages. Elle protège ses membres contre les agressions du monde extérieur, recherche d’emploi ou de logement, ou problème moral.
D’un autre côté, la crise de notre société réagit sur la famille: beaucoup de ses membres rejettent ses contraintes ; les adolescents apprécient le confort mais cherchent à échapper à l’autorité parentale ; certains parents se laissent aller à fuir leurs responsabilités d’éducateurs au nom de leur droit de « s’éclater »..
Par ailleurs, la famille est toujours un lieu d’affrontements, parfois de crises et souvent d’échecs éducatifs.
– Autour de la famille, ce sont deux visions de l’homme qui s’affrontent, mises en lumière par les débats parlementaires sur la bioéthique ou à la tribune de l’ONU.
Certes, des foyers monoparentaux aux « familles recomposées », on trouve toutes sortes de situations. Un récent Chef de l’état affirmait même : »Il n’y a pas de modèle familial; chacun invente le sien.«
La notion de famille a changé au cours des âges. Certains en déduisent que la pluralité des modes de vie modernes représenterait une forme normale d’évolution dont il faut s’accommoder, la cellule familiale classique étant une option parmi d’autres.
Nous croyons au contraire que, par rapport à la famille fondée sur le mariage, ces situations (aggravées par la montée du vagabondage sexuel et du divorce, et la banalisation de l’avortement et de l’homosexualité…
) représentent des régressions néfastes pour les individus et la société.
En effet, selon la conception Chrétienne:
– l’homme est à la fois être libre et fait pour la vie sociale ; le bien commun dépasse les intérêts particuliers mais la dignité de la personneest sacrée, y compris à l’état d’embryon, – et la famille est fondée sur le mariage, c’est à dire sur un engagement responsable.
– Comme le reste de cet ouvrage, ce chapitre présente un idéal et tente de montrer qu’il est possible de chercher à s’en rapprocher progressivement. Il souligne cependant qu’une vie familiale fondée sur le mariage est possible et qu’elle est l’une des sources du bonheur.
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1°/ L’IDEAL
La famille , cellule fondamentale de la société
Dans toutes les sociétés, les hommes ont toujours su partout nommer leur père, leur mère, leur soeur, leur grand père. Cela dit, les problèmes de vie (mariage , éducation des enfants, soutien des anciens, dévolution des biens, rapport des générations…
), sont vécus selon différents modèles.
La notion de famille a évolué, depuis le clan des sociétés primitives avec polygamie fréquente, jusqu’à la « famille nucléaire » de notre civilisation urbaine d’aujourd’hui, en passant par la cohabitation de 3 générations travaillant en commun, typique des civilisations agricoles.
De même, les modes de formation du couple humain ont évolué, depuis le rapt jusqu’au mariage d’amour, en passant par les diverses formes de « mariage arrangé ».
On est ainsi passé successivement, de la tribu à la famille conjugale, de la famille autonome à la famille socialisée, de la famille économique, dont l’objet était surtout de garantir et de transmettre un patrimoine, à la famille affective ou il s’agit surtout de créer et de transmettre de l’amour.
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Incorporant progressivement le souci du bonheur individuel, une certaine libéralisation des comportements et l’égalité (entre l’homme et la femme et entre les enfants)
, cette évolution a vu en même temps diminuer le caractère sacré de l’engagement des époux, d’où montée du divorce.
La famille nucléaire (limitée aux parents et aux enfants)
L’urbanisation, le matérialisme et l’individualisme ont abouti à modifier profondément son style de vie dans notre société, avecle travail de la femme et la maîtrise de sa fécondité.
D’une manière générale, l’évolution des mentalités, trop rapide, a eu des effets pervers en dépit de conséquences heureuses telles que la reconnaissance des droits de la femme égale de l’homme en dignité, le partage accru des responsabilités dans le couple, une meilleure participation de l’homme à la vie familiale, soins aux enfants notamment, ainsi qu’une solidarité accrue entre les familles (entraide).
A l’intérieur de la famille moderne, le couple parental recherche surtout l’intensité de ses liens affectifs. L’enfant est voulu et fait l’objet d’un investissement affectif très fort.
La famille est ainsi perçue par beaucoup de gens comme un refuge qui leur assure une protection matérielle et psychologique contre une société froide et indifférente.
Mais la réalité est souvent moins belle que la théorie. Quoi qu’il en soit, cette conception de la famille contribue à la vulnérabiliser encore.
La famille et l’enfant
Pour revenir à l’idéal, la famille offre au petit d’homme, très fragile, la sécurité matérielle et affective et, surtout, l’identité. C’est dans sa famille qu’il apprend le mieux les savoir-faire essentiels, les éléments culturels de base, langage notamment, les exigences et les règles de la vie en commun. C’est là qu’il s’imprègne le mieux et naturellement des valeurs de vie.
En effet, l’éducation lui est donnée en son sein de façon naturelle, DANS LA TENDRESSE et par OSMOSE car, avant tout, il regarde faire ses parents.
A tous égards, la famille, même quand elle est imparfaite, est irremplaçable pour l’enfant.
Pour les parents
La famille contribue aussi à l’épanouissement des hommes et des femmes dont la plupart ont en eux le désir de fonder une famille.
C’est aussi le lieu où le désir sexuel est satisfait de la manière la plus conforme à la nature de l’homme et à la dignité humaine, dans l’amour, le don de soi et le respect de l’autre.
Celui aussi où les adultes connaissent les joies les plus vraies et les plus profondes : réalisation de leur désir de maternité et de paternité, émerveillement à la naissance de leurs enfants, fierté de les voir se développer et de les aider à progresser…
avec les soucis correspondants.
L’exercice des responsabilités contribue enfin à faire grandir les parents, à exalter leur courage devant la vie et leur goût d’entreprendre.
Pour les grand parents
Les anciens trouvent aussi dans la famille des raisons nouvelles de vivre en dispensant une nouvelle forme de tendresse, en jouant à la fois le rôle de pilier et de trait d’union de la famille élargie, de phare, de mémoire, d’aide et quelquefois de recours. Ils peuvent participer, discrètement mais efficacement, à l’éducation des enfants.
Même les personnes qui vivent seules y trouvent des éléments d’appui et d’affection.
Sous toutes les latitude , le mariage
Dans toutes les sociétés, le mariage vise l’organisation d’un système de parenté où chacun se reconnaisse. L’institution existe partout sous des formes diverses avec des rites de reconnaissance par la société, ce qui prouve qu’il ne s’agit pas seulement d’une affaire privée.
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Rôle de la mère
Quelque soit la forme de la société, la femme y joue un rôle essentiel, celui de « gardienne de la civilisation « .
En conséquence, la prendre pour inférieure à l’homme est contre nature, tout comme la considérer comme identique à l’homme.
On ne peut nier la différence entre les sexes et c’est la maternité qui fait la spécificité et la grandeur de la femme.
Une bonne relation mère/enfant est irremplaçable, notamment pendant les premières années et on commence à mettre en cause, sur le plan des carences affectives et psychologiques, la vie de certains petits enfants en garderies, et le retour de certains écoliers à la clé au cou dans une maison vide ou règne la TV…
Chaque cas est spécifique mais il est important pour l’épanouissement de l’enfant que le père et la mère aient le souci de se réserver des moments privilégiés avec lui.
Rôle du père
Pour forger leur identité‚ les enfants ont besoin d’avoir deux parents et de vivre suffisamment avec eux. En particulier l’exemple et l’autorité du père sont aussi essentiels que la tendresse de la maman. Le père qui n’est pas assez présent, qui abdique, qui ne parle pas, qui ne dit pas à ses enfants qu’il les aime, qui ne défend pas ses valeurs, manque à ses responsabilités et rend un très mauvais service aux enfants.
Il en va de même des femmes qui privent volontairement leur enfant de père.
Le langage de l’Eglise Catholique sur la familleDans le désordre actuel des idées, c’est au moins une référence…
Pour les croyants, Chrétiens notamment, le mariage a aussi une dimension religieuse car ils savent, non seulement que Dieu a créé l’homme et la femme pour vivre ensemble, s’entraider et se multiplier, mais que l’Amour de Dieu est le modèle de l’amour humain et que, dans leur union, les deux époux poursuivent l’œuvre créatrice de Dieu. C’est pour cela qu’à leurs yeux le mariage est indissoluble. La famille est un lieu d’épanouissement personnel, d’exercice de responsabilités à la mesure de chacun, de dialogue entre les générations, et d’amour. Compte tenu de ce qui précède, Jean Paul II a pu parler de « Famille ,Communauté de vie et d’amour » et dire « l’avenir de l’humanité passe par la famille » et « la famille est la première école des vertus sociales nécessaire à toute société » . Le mariage est ordonné non seulement à l’épanouissement des époux mais encore à la procréation responsable considérée comme une participation à la création. D’où les exigences des Papes par rapport à la fidélité et leurs mises en garde devant certaines formes de contraception, l’avortement et les manipulations génétiques.)
« L’Eglise ne veut pas pour autant idéaliser la famille. Simplement, elle indique le long chemin à parcourir pour que la famille devienne peu à peu cette communauté fondée sur le respect et l’amour des personnes , y compris des plus fragiles, lieu de solidarité, de communication, de désintéressement, ce signe de paix et de miséricorde où l’on apprend les différences et le pardon, bref cette institution de l’amour qui a sa source en Dieu et s’ouvre largement sur la communauté humaine. »
(d’après « Théo »)
2° / LES REALITES D’AUJOURD’HUI
dans les domaines de l’AMOUR, du MARIAGE ET de la FAMILLE
Les » maladies » de la famille
Ces vérités élémentaires font partie du patrimoine humain le plus constant et le plus précieux, ce qui ne veut pas dire que la réalité ne soit parfois éloignée de cette vision là.
Des familles vivent en circuit fermé, des parents font preuve d’une autorité abusive ou contrarient des vocations ou des mariages, des mères ont l’amour possessif et des pères sont indifférents.
La famille peut aussi être le lieu non seulement d’affrontements (ce qui est normal)
mais aussi de discordes sévères, de haines tenaces et d’échecs éducatifs imprévisibles.
Dans d’autres domaines, on découvre parfois des drames comme les mauvais traitements aux enfants et les incestes…
Toutes ces maladies sont aggravées aujourd’hui par une véritable crise qui affecte à la fois l’amour, le mariage et la cellule familiale, et qui réagissent l’un sur l’autre.
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La crise de l’amour et du mariage
Quelques chiffres connus : nombre d’enfants par femme inférieur à 2, d’où non renouvellement des générations ;les femmes ont leur 1° enfant à 28/29 ans ; il y a presque autant d’avortements que de naissances ; un enfant sur 2 ou 3 naît hors mariage et il y a un divorce sur 3 mariages (1 sur 2 à Paris).
Crise de l’amour
La campagne de prévention du SIDA a mis en lumière les maux dont souffre l’amour humain réduit à sa dimension rapports sexuels. Au nom de la liberté, le vagabondage sexuel est banalisé, l’homosexualité est présentée comme une forme normale d’activité sexuelle, et les drames que provoquent l’avortement sont occultés.
L’éducation sexuelle officielle des jeunes ne fait pas suffisamment appel ni à leur sens de la responsabilité ni à l’importance dans l’amour des facteurs complémentaires de la sexualité (dimensions affective, psychologique, morale, rationnelle et spirituelle…)
Il s’ensuit que beaucoup de jeunes s’engagent dans la vie après des expériences souvent décevantes, sans une vision globale et positive de l’amour, du mariage et de la famille; d’où de nombreux échecs…
Mariage et union libre
Malgré ce contexte défavorable, les jeunes croient beaucoup à l’amour, antidote de la morosité du monde ambiant, et s’engagent très tôt dans des relations affectives et sexuelles, ne craignant plus, la pilule aidant, de faire un enfant.
C’est ainsi qu’ils sont amenés à vivre fréquemment en couple, cohabitant en permanence ou périodiquement. « Malheureusement, ces relations, souvent éphémères et incomplètes, sont souvent loin de les épanouir et de leur procurer le vrai bonheur. » (Evelyne Sullerot dans son rapport au Conseil Economique et Social et dans son livre « Pour le meilleur et sans le pire ».)
En effet, vivre avec un ou une partenaire, ce n’est pas la vraie vie familiale.
Exercer la direction matérielle et morale d’une famille, c’est, pour l’homme et la femme, assumer pleinement leur statut social et politique, ce qui implique qu’ils aient un projet de vie commun et qu’ils S’ENGAGENT définitivement à exercer leurs responsabilités vis à vis de celle ou celui qui partage leur vie et des enfants éventuels.
Cet engagement, c’est l’acte fondateur de la famille. C’est en cela qu’il a un caractère juridique et social que le Maire enregistre au nom de la société.
D’ailleurs, dans le mariage Chrétien, ce qui fait le sacrement de mariage, ce n’est pas l’amour, c’est l’engagement dans l’amour.
C’est précisément cet engagement que les cohabitants refusent, affirmant, d’une part, que leur amour, chose privée, ne regarde personne, d’autre part, que le fait de le faire enregistrer ne leur rapporte rien.
Certains ajoutent que, sans refuser le mariage, ils ne se sentent pas assez sûrs d’eux pour s’engager d’emblée définitivement et préfèrent faire un essai. D’autres disent que leur aventure est bien plus belle puisque, précisément, ils n’en partagent que les meilleurs moments… Beaucoup cherchent en outre à économiser de l’argent car notre législation favorisait jusqu’ici les concubins.
Finalement, par rapport au mariage, l’union libre tend, pour certains , à ressembler à une SARL , société affective à responsabilité limitée, où l’on consomme de la tendresse en refusant de se donner à fond et de s’engager pour la vie. (Dans d’autres cas, ce qui domine, c’est le refus de s’engager devant la société…).
Quoiqu’il en soit, les couples qui vivent ainsi ont en général peu d’enfants. Il en résulte que la maladie du mariage contribue à aggraver la crise de notre démographie.
Crise de la responsabilité et de l’autorité
C’est encore une loi de nature que l’enfant a autant besoin, pour se construire, de tendresse et de fermeté que d’un père et d’une mère.
Il a besoin d’être aimé‚ mais, plus encore, de vivre avec un père et une mère qui s’aiment.
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Or, trois facteurs accélèrent la désintégration familiale: divorce, régression de la relation mère-enfant (du fait du travail de la mère à l’extérieur)
et déclin de l’autorité parentale (une autorité exercée conjointement car la notion de « père chef de famille » a disparu.)
Dans bien des cas, la carence complète du père aboutit à de grandes difficultés éducatives pour la mère. Cela n’empêche pas certaines femmes de se faire faire un enfant tout en récusant la présence d’un homme à la maison.
Plus fréquemment encore, pour se faire pardonner leurs fréquentes absences, les parents, mariés ou non, gâtent abusivement les enfants et leur laissent faire ce qu’ils veulent.
Ces comportements illustrent à la fois la crise de la responsabilité et la crise de l’autorité qui caractérisent notre société.
Crise de la communication
Il s’y ajoute une crise de la communication (qui commence d’ailleurs souvent dans le couple ).
Le dialogue familial suppose à la fois une grande attention des parents aux jeunes, beaucoup de temps et de patience et un certain sens de la psychologie et de la pédagogie.
Or, en ce siècle qu’on dit pourtant celui de la communication mais où l’on veut tout, tout de suite, et où règnent l’argent et la télévision, trop de parents surmenés n’ont plus assez de temps et d’énergie à consacrer à leurs enfants.
Comme il y a simultanément crise à l’école, que la pratique religieuse baisse et que les médias servent de caisse de résonance au désordre des idées, beaucoup de jeunes de tous milieux grandissent finalement sans être « élevés« . Ils sont littéralement déboussolés.
Le noeud de la crise de notre société est donc dans l’éducation familiale.
La famille, pilier & ciment de la société et amortisseur des difficultés sociales
En effet, il est reconnu que les familles heureuses aident les personnes à devenir heureuses et capables de rendre les autres heureux. A l’inverse, les familles malades font des époux blessés, des enfants vulnérables et une société déséquilibrée: drogue, délinquance…
La crise de la société française est si grave que sa solution réclame à la fois:
– des efforts de la part de l’état, avec la mise en oeuvre d’une politique familiale,
– et surtout les efforts individuels des hommes et des femmes qui constituent nos familles.
On constate cependant un certain retour du pendule vers le bon sens.
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3° / COMMENT CONTRIBUER AU RENOUVEAU DE LA FAMILLE ?
– D’abord, inciter les pouvoirs publics à définir et mettre en oeuvre une véritable « Politique Familiale » de façon à rendre à la famille confiance en elle même et à lui donner les moyens de remplir son rôle car elle « travaille pour l’Etat »
– Il est incapable d’accomplir les tâches éducatives aussi bien qu’elle.
– Il a tout intérêt à ce que les familles soient heureuses et équilibrées :
– sur le plan démographique d’abord. C’est dans les familles fondées sur le mariage que les naissances sont les plus nombreuses. Or, la population française vieillit et il est nécessaire d’encourager le renouvellement des générations. Il y va de la survie de notre pays et de la conservation de son identité culturelle alors que les immigrés ont beaucoup d’enfants.
» Comment pense t- on pouvoir maintenir l’équilibre, et donc la paix, entre des nations de vieillards gorgés de biens et des nations de jeunes gens dépourvus de tout ? » ( Henri Hude )
Or, les familles nombreuses sont défavorisées par la législation actuelle alors que ce sont elles qui contribuent à ralentir l’effondrement de la démographie.
L’aspect quantitatif de la politique familiale consiste donc à encourager les familles à avoir des enfants afin qu’il y ait demain assez d’adultes pour faire vivre les retraités et les jeunes.
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En Suède où cette évidence a été prise en compte par les pouvoirs publics: congé parental rémunéré, allocations familiales généreuses, aménagement du temps de travail… l’indice de fécondité est remonté à 2,1.
– sur le plan social et politique, les familles jouent, en plus de leur mission naturelle, un important rôle économique et surtout celui d’amortisseur majeur des difficultés sociales.
Investir pour favoriser la vie harmonieuse des familles (logement, écoles, loisirs des enfants…)
, c’est à la fois favoriser l’épanouissement des personnes et faire des économies sur des lourdes dépenses induites par la délinquance et la mauvaise insertion sociale.
C’est l’aspect qualitatif de la politique familiale.
Mais les familles n’ont pas la force nécessaire pour faire prévaloir ces objectifs face aux groupes de pression qui raisonnent surtout en termes de profit immédiat, ou pour qui la famille classique constitue un obstacle à la propagation de leur idéologie, alors que :
– le chômage, la crise du logement, le décalage entre les allocations perçues et le coût de l’éducation des enfants rendent difficile la vie des familles nombreuses.
– les familles stables fondées sur un engagement et centrées sur un projet, c’est à dire sur le mariage, sont fiscalement défavorisées par rapport aux unions libres.
» Une société n’est pas neutre, elle a nécessairement une politique devant la vie. Celle que nous avons mise en place insensiblement traque, depuis la naissance des enfants jusqu’à la mort des parents, ceux qui ont choisi de transmettre la vie et la culture. Elle les humilie, les bafoue, les ridiculise et les exploite... »(Pierre Chaunu)
– Le statut de mère au foyer est économiquement pénalisant et psychologiquement dévalué (Un « légume » a dit un homme politique…)
alors que son rôle est irremplaçable.
Contre ces dangers, la famille a donc besoin d’être protégée et aidée .
Il faut donc maintenir la pression pour inciter l’Etat à avoir une Politique familiale.
Celle-ci doit dépasser la stricte distribution d’allocations et traduire la volonté politique d’encourager la natalité responsable et de favoriser la vie équilibrée des familles.
A cet égard, malheureusement, deux conceptions de l’homme s’affrontent en France.
– Les uns (marxistes et ultra libéraux) veulent baser la société sur l’individu et privilégier sa liberté. Ceux-la ont souvent des positions en flèche devant des problèmes comme le SIDA, l’avortement, les manipulations génétiques ou l’euthanasie.
– Les autres, d’inspiration Chrétienne, préfèrent la fonder sur la cellule qu’est la famille Pour eux, une société fondée sur la juxtaposition d’individus est artificielle.
Ils remarquent aussi que la société du 1° type ouvre la voie au totalitarisme qui écrase les personnes. On l’a bien vu à l’Est pendant des décennies.
Pour faire prévaloir notre point de vue, il nous reste à agir pour que ce ciment prenne réellement et que les familles puissent léguer à leurs enfants un vrai capital-bonheur.
Dans ce but, renforçons le regroupement, la cohésion et le dynamisme des familles; les Associations Familiales travaillent dans ce sens. C’est une première direction d’effort.
Elle est inséparable d’une vigoureuse campagne de promotion de la famille pour améliorer son image de marque, celle des mères de famille notamment, choix du travail ou non.
L’aspect psychologique de la crise est en effet déterminant; il faut d’abord vouloir redonner aux parents confiance en leur mission.
Mais n’attendons pas de l’Etat la solution de problèmes qui sont majoritairement PRIVES. C’est surtout par nos efforts individuels que nous donnerons envie aux jeunes de constituer à leur tour des familles équilibrées et heureuses, capables, de proche en proche, de guérir notre société et nos concitoyens.
– C’est pourquoi, et sans attendre le résultat des efforts précédents, encourageons-nous mutuellement à « BALAYER CHACUN DEVANT NOTRE PORTE » en matière d’EDUCATION, notamment éducation à l’amour et au mariage, éducation du coeur et du caractère.
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Balayer devant sa porte, cela veut dire assumer chacun son rôle éducatif au jour le jour.
D’abord, 1° principe, en s’efforçant de donner l’exemple car, en matière d’éducation, le témoignage de vie vaut tous les discours.
Pour redonner une boussole à nos jeunes, il faut cependant leur enseigner aussi un certain nombre de choses, notamment des évidences perdues de vue depuis 1968.
Ce faisant, 2° principe, essayons de mettre la barre assez haut, en proposant un idéal élevé, mais partons de ce qu’il y de bon en chacun et appelons les êtres à un bien supérieur.
Aux jeunes parents, on pourrait d’abord dire ceci :
A propos d’autorité parentale
La tendresse n’est pas l’apanage exclusif de la mère… pas plus que la fermeté n’est la caractéristique unique du père.
L’autorité des parents s’exerce à deux et repose sur 4 pieds qui s’appellent COMPETENCE, EXIGENCE , AMOUR ET EXEMPLE .
L’exigence est particulièrement nécessaire vis à vis d’adolescents qui ont besoin, pour se construire, d’avoir un « butoir » en face d’eux.
La maxime suivante est applicable à la fois au niveau conjugal et au niveau parental :
« Ton amour sans exigence m’étiole; ton exigence sans amour me décourage; ton amour exigeant me fait grandir… »
Les valeurs de vie, un patrimoine à transmettre
Parmi vos tâches essentielles figure la transmission des Valeurs qui donnent un sens et un cadre à la vie.
On peut schématiser l’ensemble de celles- ci par un meuble à 6 tiroirs renfermant :
– les valeurs physiques, comme la santé, le dynamisme vital, l’équilibre, la joie…
– les valeurs intellectuelles : goût de l’effort, curiosité d’esprit, maîtrise d’une méthode de travail…
– les valeurs morales telles que probité, courage, volonté, et couple liberté/ responsabilité…
– les valeurs sociales comme la sociabilité, le sens des autres, la générosité, l’indépendance d’esprit…
– les valeurs artistiques: sens du beau et créativité notamment…
– les valeurs spirituelles: sens de la transcendance et foi religieuse.
Comment faire passer ces valeurs ?
Il y a cinq principes de base :
– On élève un enfant pour lui même (et pas pour « se faire plaisir »…)
– Donnons-lui une colonne vertébrale ! Ne l’enfermons pas dans un corset…
– L’éducation, c’est du « sur mesures »…
– Les résultats scolaires ne sont pas l’essentiel. C’est toute la personne qu’il faut éduquer, y compris le corps, le coeur et la volonté…
– L’éducation, c’est la responsabilité des deux parents, mettant en oeuvre ensemble une autorité où la tendresse est inséparable de la fermeté .
En matière d’éducation affective et sexuelle
Corps, esprit et âme, l’homme et la femme sont des merveilles fragiles. Comme eux, l’amour est merveilleux et fragile.
C’est un sentiment mystérieux qui prend tout l’homme et toute la femme avec leur corps, et notamment leur sexe, mais aussi leur coeur, leur psychologie, leur intelligence, leur culture, leur raison et leur dimension spirituelle.
Par conséquent, en réduisant l’amour à la recherche du plaisir, on le mutile gravement car, par exemple, sa composante « tendresse » est peut-être celle par laquelle on s’achemine le mieux vers le bonheur durable.
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L’amour est une création continue. Il a besoin de temps et de soins pour se développer.« L’harmonie entre deux êtres, c’est aussi le fruit de leur volonté commune de construire le bonheur. L’amour, ce n’est pas seulement un miracle né d’une rencontre; il est, jour après jour, ce que l’on veut qu’il soit et il faut décider de le réussir. » ( Martin Gray )
Alors que tant de gens ne songent qu’à « s’éclater », le fait de vouloir d’abord rendre l’autre heureux implique l’acceptation d’un certain renoncement à soi qui vous donne du bonheur. A contrario, l’égoïsme est le pire ennemi de l’amour.
La fidélité est une qualité de base du vrai amour parce qu’il a besoin de se construire dans la durée. Des expériences préalables avec d’autres personnes ne sont pas obligatoirement le bon chemin pour découvrir l’amour vrai.
L’amour implique non seulement des échanges de caresses mais surtout une communication profonde. Le silence tue l’amour. La communication entre deux amoureux entraîne inévitablement des affrontements entre eux. Ils peuvent être une occasion de progresser car le pardon mutuel est encore une condition du vrai amour.
– en matière d’éducation au mariage
Nos jeunes croient très fort à l’amour. Montrons-leur que le mariage peut leur permettre de vivre un bel amour.
Commençons par leur commenter de façon positive les statistiques.
Si un couple sur 3 se défait, cela veut dire que deux sur trois tiennent. Si la majorité des gens y connaissent le bonheur, c’est qu’ils ont eu de la chance mais surtout qu’ils ont fait un choix raisonnable, qu’ils ont placé la barre assez haut, et qu’ils ont consacré du soin à l’entretien quotidien de leur amour, feu initialement ardent qu’il faut alimenter en permanence.
Expliquons leur aussi que :
LE MARIAGE, C’EST D’ABORD UN CHOIX
Aidons les adolescents à faire intervenir aussi la raison dans leur vie affective en essayant d’établir eux mêmes à l’avance leurs critères de (bon) choix. Malgré le caractère théorique de cette démarche, le fait d’y avoir réfléchi avant éviterait peut être à certains de s’embarquer avec quelqu’un dont on peut prévoir que ça se terminera mal du fait, par exemple, de grandes différences d’éducation, de culture, de religion, ou du fait d’un vice chez l’autre: alcool, drogue, jeu, homosexualité.
On voit notamment trop de jeunes filles dire en pareil cas : Je l’aime, donc je le changerai… et c’est l’échec.
LE MARIAGE, C’EST UNE CORDEE EN MONTAGNE
Il ne viendrait pas à l’idée de deux alpinistes de prendre comme devise Pour le meilleur et sans le pire. Ils partent pour tout partager: la joie d’atteindre le sommet et la chute éventuelle dans une crevasse. Pour cela, ils s’encordent pour s’assurer alternativement, se donner mutuellement confiance, se tirer l’un l’autre d’un mauvais pas, le cas échéant.
De même pour le mariage. Quand on aime en effet, on a envie de partager les joies de l’autre, ses soucis et ses peines. Comme dans une cordée, chacun prend l’autre en charge.
Cela introduit immédiatement la notion de fidélité car on voit mal de vrais amoureux fixant, comme pour le yaourt,
un délai de validité à leur amour.
S’encorder, pour le meilleur et pour le pire, c’est VITAL à la fois pour les grimpeurs et les mariés. Les uns et les autres savent d’ailleurs que la corde doit toujours être assez lâche pour ne pas gêner les mouvements de chacun, tout en étant capable de résister à un choc.
Les Espagnols arrivant aux Caraïbes brûlèrent leurs vaisseaux pour s’interdire de revenir en arrière.
En amour, brûler ses vaisseaux, c’est faire confiance à l’autre et parier que ça va marcher, donc en prendre les moyens. Au contraire, se ménager « une issue de secours », c’est prendre le risque d’accepter que « ça craque » à la première occasion.
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Le MARIAGE, C’EST UNE RECHERCHE PERMANENTE DE L’AUTRE
Chercher à connaître l’autre sous tous ses aspects implique un effort permanent d’attention et de recherche. Cela exige qu’avant de s’engager sérieusement, on cherche à découvrir l’autre sous tous ses aspects. L’apparence agréable d’un visage et d’un corps ne suffit pas… C’est en ce sens que les fiançailles représentent une période probatoire importante, à condition de ne pas se mettre en contradiction avec soi même, c’est à dire de ne pas se donner physiquement avant d’être sûr d’aimer réellement. C’est la source de souffrance chez bien des jeunes filles notamment qui sont larguées après s’être offertes.
La connaissance de l’autre réclame aussi un effort permanent de dialogue. C’est en s’exprimant l’un à l’autre ce qu’ils pensent, ce qu’ils croient, ce qu’ils ressentent que le mari et la femme entretiennent et approfondissent leur connaissance mutuelle.
Sachant que non-dits et malentendus mènent au divorce, les mouvements conjugaux recommandent de se donner un rendez-vous spécial une fois par mois pour se communiquer l’un à l’autre, à loisir, dans la sérénité et la prière, ce qu’ils ont d’important à se dire pour construire leur foyer.
LE MARIAGE, ANTIDOTE DE L’EGOISME
Le B-A, BA du mariage, c’est d’accepter de donner, et notamment de se donner à l’autre, puis aux enfants, tout en sachant (quelquefois plus difficile)
demander et recevoir.
A propos du don de soi, et au risque de braver la mode, faisons prendre conscience aux jeunes, filles notamment, de l’importance du don de son corps, un cadeau à ne pas galvauder au profit du premier venu. Parallèlement, même à l’ère de la pilule, enseignons aux garçons la psychologie féminine et apprenons-leur leurs responsabilités morales vis à vis des filles car, pour celles-ci surtout, le don physique engage tout l’être.
LE MARIAGE, UN PROJET DE VIE A DEUX
La mise au point de ce projet suppose qu’on ait au départ un idéal de vie et un minimum de goûts et d’aspirations en commun. Il est clair que la vie se chargera de déranger notre projet; encore faut-il en avoir esquissé un comme cadre à nos rêves et à nos espoirs.
Parmi les éléments du projet, il y a l’appel d’enfants à la vie.
La procréation présente évidemment (et heureusement)
une part de mystère mais elle comporte aussi des éléments objectifs que les époux doivent connaître (cycle de la femme notamment)
pour pouvoir exercer complètement leurs responsabilités.
– L’inconscience est coupable: laisser au hasard le soin de déterminer le nombre de ses enfants relève de l’irresponsabilité alors qu’il ne s’agit pas seulement de les mettre au monde mais surtout d’en faire des hommes.
– A l’inverse, faire confiance exclusive à la contraception chimique ou mécanique confère à la procréation un caractère artificiel. Par ailleurs, cette pratique a, dans le couple, certains effets pervers, notamment sur le plan psychologique en favorisant par exemple l’égoïsme masculin.
– LE MARIAGE, C’EST UNE PLANTE A CULTIVER
Ce projet, apprenons aux jeunes à le traiter comme le jardinier soigne un jeune plant. Emonder, c’est par exemple, pour Monsieur , tailler dans le vif des matches de football suivis à la TV des heures durant ou des vieux copains un peu encombrants …) . Biner régulièrement, pour Madame, c’est par exemple éliminer les repousses éventuelles d’égoïsme capricieux et d’allergie à l’administration.
Arroser fréquemment, c’est, pour chacun, avoir de petites attentions pour l’autre, lui dire des mots gentils, savoir pardonner ses petites imperfections, lui faire des concessions …
Parmi les « engrais » à recommander pour le mariage, conseillons au moins l’HUMOUR ET LA FANTAISIE… Car l’habitude et l’ennui tuent l’amour aussi sûrement que l’égoïsme.
Education globale : corps, coeur, raison et caractèreLa mode actuelle est au « Faites vous plaisir ! Dépêchez-vous! Consommez!« .
Or, pour être vraiment heureux, il faut d’abord vouloir donner de l’amour, être patient, renoncer parfois à un petit quelque chose pour recueillir d’avantage. Pour les aider à marcher sur le chemin du bonheur, aidons donc les jeunes à retrouver la place du coeur, de la sagesse et de la volonté… et celle du temps, dans leur existence.
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Ces dispositions ne sont pas innées chez l’enfant, d’où la nécessité non seulement de le préparer au Bac mais surtout de développer en lui les qualités du coeur et du caractère, indispensables, aujourd’hui comme hier, à la vie et au bonheur.
Eduquer son coeur, c’est l’encourager au partage, à la solidarité, à la tolérance, au pardon, au service gratuit … tous éléments qu’on retrouve à chaque instant dans la vie familiale et dans la pédagogie complémentaire des mouvements de jeunesse.
Eduquer son caractère, c’est notamment lui apprendre progressivement à se contrôler, à exercer sa volonté, à faire preuve d’indépendance d’esprit… Commençons à l’enseigner très tôt, en aidant progressivement le bambin à remporter de petites victoires sur lui-même.Le sport, individuel ou collectif, est un excellent moyen d’éduquer le caractère à travers l’émulation, le goût du risque, l’esprit d’équipe, le respect des règles, la discipline de l’entraînement … mais il ne suffit pas. Il faut aussi apprendre à l’enfant à se lever le matin sans rechigner, à aller à l’école à pied, à vaincre sa peur de la nuit…
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CONCLUSION
La famille est une réalité humaine éternelle. Elle porte la marque de la contradiction vivante qu’est l’homme, capable du meilleur et du pire. Elle est en permanence soumise à des forces antagonistes, donc en équilibre instable. Sa réussite dans la durée exige des efforts patients et permanents de tous, notamment des parents.
Moyennant quoi, elle peut être un lieu de grand bonheur et une vraie cellule de société.
C’est pourquoi, au delà de l’enjeu qu’elle constitue pour la pub, et devant l’écroulement des Valeurs, elle reste au plus haut niveau dans les sondages.
Cela dit, ses problèmes spécifiques constituent la trame même de notre crise de société…
Par exemple, le travail de la femme réagit sur le chômage et sur le déséquilibre de la jeunesse.
Il faudrait donc tout faire pour renforcer et valoriser les familles en favorisant l’engagement responsable des parents. A cet égard, on devrait comparer objectivement ce qu’on appelle la réussite dans le monde moderne et le bonheur d’une famille.
La première est fondée, entre autres, sur l’instantanéité, la performance, l’attrait du sensationnel, la massification des actions et le culte de la liberté (ou de la jouissance )…
La construction familiale repose au contraire sur l’accomplissement, obscur mais dans l’AMOUR, de petites tâches qui exigent petits pas, longue patience et travail en profondeur, adaptation à la personnalité de chacun et surtout désintéressement total, don de soi permanent et fréquent appel à l’abnégation.
D’un côté, la civilisation mécanique et médiatique; d’un autre, ce que Jean Paul II appelle « LA CIVILISATION DE L’AMOUR »…
Le grand problème des générations à venir sera de rendre possible la coexistence entre ces deux types de vie en donnant priorité à l’essentiel.
Il nous appartient, à nous qui croyons et espérons en la Famille, de travailler, d’une part, à convaincre les pouvoirs publics de mieux soutenir les familles, d’autre part et surtout, à rendre les parents davantage conscients et heureux de leurs responsabilités éducatrices, à les aider à les assumer et à montrer aux jeunes que
La vie de famille, c’est l’essentiel du bonheur.